vendredi 26 septembre 2014

Projet "Le Supplice de l'Ange"

C'est un projet qui est né d'un ami précieux, ils se sont arrangés entre eux et voilà qu'une date se rajoute à nos entraînements. Cette fois, je trouve un co-voiturage matinal et j'arrive en fin de matinée à Limoges et nous voilà reparties dans la Creuse pour un entraînement presque "volé"'.
Sur la route, elle ne fume pas. Elle s'est mise à la pipe, fait des tas de blagues dessus et s'amuse que j'en ai une aussi, elle la réclame pour faire des photos ensemble. Sauf que la pipe, quand on la fume, on peut faire que ça... pas de pipe en conduisant, pas de pipe en pianotant...

Nous arrivons pour un déjeuner tardif, une pause au soleil entre sieste et apprentissage des cordes pour Pier et notre entraînement "bonus" peut se mettre en place.
Tout se passe sans souci notable, elle a encore modifié quelques éléments comme toujours, parce qu'elle veut toujours faire mieux.
Nous restons dîner en compagnie de nos hôtes et repartons sur Limoges où Ardonau nous attend pour prendre un verre en discutant du projet.
Je suis spectateur de leur dialogue, elle me défend bec-et-ongle, imposant temps de repos et modérant le nombre de poses à réaliser. Je trouve ça émouvant comme elle prend soin de moi avec un ton de parole qui ne se négocie pas. Parfois, on me demande mon avis, j’acquiesce, parce que moi : "je fais ce que vous voulez, les gars ! je suis venue pour ça".
Ils finissent par être d'accord, Mila fait des schémas des poses négociées, je dis oui, pas de problèmes avec un doux sourire. Je sais que je ne peux pas être mieux entourée.
Il ne peut pas s'empêcher de nous tirer le portrait en cette fin de nuit d'une bien longue journée.
Photo : Ardonau ( http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/ )
Le samedi, rendez-vous pour les photos avec Ardonau sur le parvis de la cathédrale. Il fait beau.
Il nous rejoint et nous contournons la cathédrale pour arriver sur une de ces minuscules et toutes tordues places que le moyen-âge a légué à nos plans d'urbanisme moderne.
Là, plusieurs maisons à colombages dont une en travaux manifestes, c'est là que nous allons, nous entrons et enfilons 3 escaliers pour arriver sous le toit, devant les magnifiques poutres qui tiennent la maison. Voici le lieu du crime avec la propriétaire qui nous aide à nous faire une place.
Tout le monde prend ses marques,  Ardonau regarde le soleil et l'orientation de la lumière, Mila inspecte les poutres et le périmètre alentour, je me cherche un endroit où me changer.
Quelques lourdes bricoles sont déplacées pour nous faire de la place, je me change, Mila place le point de suspension.
J'essaye d'oublier les échafaudages et le vide. Je veux donner le meilleur de moi-même, je suis tellement heureuse qu'il ait eu envie de ce projet. Un peu comme elle me veut dans ses cordes, il me veut pour ses photos et j'ai fait des choix où je suis rarement une personne que l'on souhaite.
Tout est en place, les choses sont clairement formulées pour tous, elle me demande d'aller sous l'anneau de suspension.

Elle commence la mise en place d'un harnais de buste que je garderais tout au long de l'après-midi. Une autre façon d'approcher les cordes que je n'avais pas touchée jusque là et dont je les remercie de me donner l'occasion de la découvrir.
Elle termine avec un harnais de bassin. Et voilà, la première pose qui s'installe, la suspension se met en place, elle termine de lier mes mains, le tabouret qui nous aide disparaît du cadre.
J'entends des bruits de mouvements et de déclenchement, des chuchotements aussi.
Il dit qu'il a terminé, elle ramène tout le monde à ma hauteur et me revoilà au sol.


Original Video - More videos at TinyPic 
Une petite pause parce que je ne vois pas le temps passer, parce l'air du temps est doux et qu'il faut prendre le temps.
N. nous amène des boissons et la conversation dérive sur l'échafaudage le long de leur maison. Mila laisse entendre qu'elle a toujours rêvé de faire une suspension de ce genre. Elle insiste pour que Ardonau prenne cette photo-là aussi dans sa série. On parle des poses à faire, du temps qu'il reste et de la luminosité. Il faut s'y remettre sans mollir.
Elle me lie les mains de façon différente en amont de la suspension. Cette suspension dure assez longtemps mais est relativement confortable. Elle finit par me fixer les pieds pour que je cesse de tournoyer et elle me délie les mains pendant la suspension pour le besoin des photos.
C'est étrange, cette sensation de suspension verticale et non-inversé, pour le coup, on a une vraie sensation de lévitation. Comme c'est étrange de se délier les mains tout en gardant la pose.

On me redescend et voilà le plus gros du morceau, la suspension en inversé. C'est très étrange d'avoir les mains libres, cela donne envie de s'accrocher quand il n'y a rien à quoi s'accrocher. Je crois que je préfère encore avec les mains liées sans aucun choix que de me laisser aller. Et finalement, j'en reviens toujours au fait que mon induction passe par les bras.
C'est une position compliquée à tenir pour moi, les minutes s'éternisent, je focalise sur ma respiration lente et profonde, j'entends les déplacements dans l'air, les déclencheurs. Elle prend régulièrement, mon avis "ça va ?", à un moment, je lui signale que j'aimerais qu'on songe à arrêter la chose.
Un flottement et me voilà, soutenue, le soulagement est instantané et agit presque comme un "turn on".
Je reprends mes esprits pendant que ça s'agite autour de moi, il est toujours question d'échafaudage et la lumière s'enfuit avec la journée.
Pendant que je me recompose tout s'organise, le point de suspension est mis en place après aval de P. (échafaudeur professionnel de son état), il est d'ailleurs réquisitionné pour aider à mon installation.
J'ai l'impression de vivre un cauchemar (je suis sujette au vertige), je repense aux conseils d'un ami psy* avec qui je devise sur le sujet de mon vertige depuis qu'elle m'a parlé de son projet de suspension à un pont.
Je visualise l'échafaudage, le vide dessous, moi dessus, je focalise sur l'instant T, j'en oublie le monde, l'univers.
Elle place d'autres cordes sur moi, elle préfère une suspension latérale et repasse par un TK. J'aime le TK, il me rassure et m'évite d'avoir envie de m'accrocher à n'importe quoi avec mes bras.
Harnais de buste et harnais de bassin sont en place, les points de suspension aussi, P. et Ardonau sortent sur l'échafaudage, elle aussi, c'est à moi.
Avec mes bras prisonnier du TK c'est une opération périlleuse, tout le monde me guide et me soutient. Je ne jette pas un seul regard en bas, mon esprit se fixe sur le haut de l'échafaudage et les personnes qui m'entourent.
Les hommes me basculent, me portent et elle commence à m'attacher à la suspension. Tout tremble doucement à chaque mouvement c'est stressant et j'essaye de faire abstraction. N. doit sentir mon malaise et dit que je dois regarder le plancher du 3° étage que je verrais le sol que ça me rassurera. L'idée m'apparaît lumineuse, je fixe le plancher comme si je voulais fusionner en lui.
Elle s'active autour de nous, d'un seul coup, un bruit sourd, le temps qui se suspend. Je reconnais cette sensation, c'est comme à Munich quand elle est tombée de scène...
Sauf que là c'est un échafaudage de 3 étages... Tout le monde en est quitte pour une belle peur, elle a été retenue par une balustrade dont c'est le but.

Elle lance le signal de reculer, Ardonau dégaine son appareil, prend les clichés et ils sont déjà en train de me soutenir pour me redescendre, rentrer par la fenêtre sans regarder en bas et sans mes bras toujours liés.
Sentir un sol sur et ferme sous mes pieds : respirer.
Nous sommes contents de notre exploit, les tensions tombent et les langues se délient. Je comprends qu'il y avait des personnes en bas qui ont pris des photos de la suspension, je regrette de ne pas voir ces photos-là.
On continue à ranger en causant tranquillement, Ardonau me donne une couette en disant que Mila avait demandé une couverture pour moi, il insiste pour que je parte avec. Je trouve cela tellement incongru autant qu'attentionné.
N. et P. nous paye une boisson, Ardonau dit qu'il va vite travailler les photos, nous sommes tous un peu impatients.

Nous rentrons chez elle et Ardonau nous tient en haleine une partie de la soirée en distillant les photos à mesure qu'il les fait. Finalement, alors que nous voulions nous coucher tôt, nous nous couchons super tard mais en ayant vu les photos de la journée.

Le dimanche s'étire tranquillement, j'ai un co-voiturage vers midi, elle attend un invité qui arrive au moment où nous partons rejoindre mon co-voitureur.
Je monte dans la voiture d'un grand gaillard à l'allure peu avenante, pendant qu'elle repart vers de nouvelles aventures.
Finalement, mon co-voitureur s'animera en m'expliquant le projet de fou sur lequel il travaille depuis 4 ans : il se construit son propre bateau dans lequel il habitera.
Le voyage se fait rapidement à l'écouter me narrer ses aventures de bricoleur dingue.

Un week-end en parenthèse sur la route de Saint-Pétersbourg.

Crédits : Cordes par Ludmila Metresa/Ropes - Photos par Ardonau ( http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/ ).
Série compléte avec vision du projet par l'artiste : http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/2014/09/le-supplice-de-lange.html

samedi 13 septembre 2014

Saint-Avit #1, RopeFest

Un week-end en saut de puce.
C'est Fab qui m'emmène à défaut de co-voiturage. Route tranquille et bucolique, paysages surprenants, vieilles pierres, routes serpentantes et absence de réseau, nous sommes bien dans la Creuse. ^^
Nous tentons de joindre le village seuls en oubliant l'absence de réseau, si bien que même si nous trouvons bien le village, nous avons quelques difficultés à trouver la maison.
Finalement, c'est le cabriolet de Mila qui nous servira de repère.

Le repas, une petite pause de digestion au soleil et nous voilà, parties pour notre premier entraînement du week-end. Moment de flottement pour trouver la bande-son que j'ai sur mon e-pc.
Échauffement avec le chien qui pense que nous voulons jouer.
Les enchaînements se passent sans trop de souci.
Elle a encore amélioré des détails depuis notre dernière répétition, c'est subtil mais sensible pour moi mais je me demande si l’œil non-initié le ressent aussi.
La fin de journée s'organise autour d'une petite balade dans la région, pont romain toujours en service, vieilles églises, village de sculteurs, etc.
Et un petit repas au restau pour que Pier fête son anniversaire en notre compagnie.

Le dimanche, on se laisse le temps de s'éveiller en profitant du paysage alentours et notre dernière répétition du week-end se place en fin de matinée.


C'est Fab qui apportera un œil extérieur à la répétition. En précisant les changements qu'il a remarqué et en les commentant. Il apporte une vision intéressante mais pas forcément réaliste de ce qu'est ce genre de chorégraphie où une idée générale s'adapte aux impondérables du maniement des cordes.
Refait 10 000 fois, le même enchaînement sera toujours différent, parce que c'est un art vivant lié aux caprices de la forme de l'une ou de l'autre ou au décalage d'un demi-millimètre d'une corde.

Un repas rapide et nous voilà déjà sur le trajet du retour.

Crédits : Cordes par Ludmila Mestresa/Ropes - Photo par Fab Crobard