samedi 27 août 2011

FIP 48

Bien des années qu’une FiP ne s’était placée dans mes cheminements.
Mais ceux-ci sont trop présents pour ne pas envahir la totalité de mon espace conscient.
Entre réponses et nouveaux questionnements tout prend une autre dimension.
Et puis, les nouvelles prises de conscience amènent aussi une vision comme neuve, tout peut potentiellement redevenir une « première fois » quelque part.

Drôle de FiP. G. qui nous accueille à la salle dans un discours désordonné où il est à la fois question de plaintes contre la salle pour nuisance sonore et de gars chargé de surveiller la soirée. Pas le temps, on est à la bourre et on doit tester notre nouvelle idée de configuration de salle. Entre routine et nouvelle installation, chacun œuvre dans son coin. H.&I. arrivent, A.S. aussi, on monte estrades, tables, chaises, portants.

I. crie : « Fab, il y a quelqu’un pour toi ! »
Je me souviens de P., que j’avais un peu oublié. J’essaye d’avancer au plus vite l’installation de la vidéo pour ménager du temps à Fab pour qu’ils causent « entre mecs ». Cela semble si important, cette histoire de connivence du genre, je me dis que pour Fab comme pour P., il est peut-être temps de parler hors d’oreilles féminines indélicates.
Une fois, la vidéo finie, je m’absorbe au fumoir. On a rangé tout n’importe comment à la dernière et il y a pas mal de choses à remettre en place.
J’installe le nouveau panneau qui fait l’unanimité – mais bon, ça je le savais, c’était une évidence quand il a été fini.
A part la « radio » c’est de loin la plus belle composition d’empreintes que nous ayons réalisée.
C’est même chouette, parce qu’il en reste encore deux à faire et que je pense que maintenant que nous sommes mieux dans le truc, le résultat sera intéressant.
Et puis à un moment, A.S. a fini d’installer son coin, plein de gens arrivent. Il n’y a jamais eu autant de monde pour installer une FiP. S. devait venir faire des photos mais c’était prévu et ce n’est même pas ça. N. arrive et me chope par surprise par le jeans me faisant lâcher un cri. Erf, pas ce soir, les trucs de « bête traquée » quand je me sens si proche de son état d’esprit entre J. et M.

L’installation se poursuit. Il y a un black qui se marre quand H. lui explique qu’il doit être au minimum « tout en noir ». Je ne crois pas qu’H. saisisse la portée comique de la situation quand il gueule au type que ce n’est pas drôle.
Moi, oui…
C’est le bordel avec le son, j’apprends que le chauffage est coupé et j’ai déjà froid…

N. me présente un couple de Tours, très sympathiques.
Ils me disent que N. leur a parlé de moi…
« Ah ?... euh… »
Mais sauf que moi, je ne sais pas ce que l’on dit de moi. Cela me donne toujours envie de me dandiner d’inconfort ces situations où manifestement l’autre en sait plus que moi sur moi. (Et ça recommencera quand R. nous fera sa « crise de fanitude ». )
Elle, surtout, elle en parle beaucoup, son visage s’anime quand elle en parle, elle voudrait faire passer quelque chose que je ne saisis manifestement pas.
Peut-être de l’ordre de ce que V. disait à propos de mon « soi-disant » légendaire lâcher-prise.
Je ne sais pas, je sens bien que ça aussi c’est dans le « non-résolu » pour l’instant.
Elle dit que N. leur a dit qu’il s’était passé « quelque chose » et il y a presque de la vibration dans sa voix quand elle le dit.
Et cette vibration ne peut venir que d’une conviction acquise soit de ce qu’elle a vu de moi avec N. ou de ce qu’elle a entendu de N.
Mais cela restera de l’ordre de la question.
Lui, plus distant dans la verbalisation directe mais plus ouvert dans la CNV.
On parle cordes, je dis que j’aimerais essayer avec une femme, elle dit qu’elle commence à apprendre. Il propose que plus tard, je ne décline pas même si c’est évident que ce n’est pas vraiment à ce genre de femme à qui je pense.
Je verbalise mieux sur la contrainte depuis que j’ai compris jusqu’où cela allait se nicher, au point d’aimer porter une jupe longue serrée en bas…

J’installe en leur retombant régulièrement dessus. On discute un peu, comme ça, en papillon comme on apprend.
A. sort de magnifiques cordes noires, d’un noir profond.
Elles ont comme une sorte de vibration, quelque chose de sensuel qu’il faut que je les touche.
Ce n’est pas souvent que j’ai besoin de toucher la corde avec ma main.
Mais ces cordes noires, la profondeur de la couleur – surdose de teinture de l’aveu de l’auteur – a quelque chose qui appartient à l’acid, je crois que c’est ça qui m’attire.
Il parle d’en faire des rouges, et je les vois dans mon esprit, ce rouge profond qu’elles pourraient avoir et pour un peu, même ces cordes imaginaires j’aimerais les toucher.
Et l’esprit fatigué rebondi sur les mots du report, être attachée sous LSD…
Rien que l’idée ferait partir en bad l’essentiel de l’humanité ^^
Et pourtant, Sentir les Cordes couler, Se dissoudre dedans… Je ne dis pas monter l’acid dans les cordes, trop hard avec les crises de speed, ça oui c’est un coup à mal partir.
Mais après, une fois l’acid monté quand le monde est différent, plus souple, plus doux, plus coloré… Tiens peut-être même qu’on verrait les cordes en couleurs.

Je ne sais pas si la corde fait le même effet à N. ou si c’est moi qui lui « transfère » mon trouble. Mais il prend la corde et mes avant-bras dans un seul et même mouvement. Et commence à enrouler la corde en partant des bras. Je sens ma propre induction monter, je crois que je m’excuse auprès du couple avec qui je parlais.
Mon regard croise celui d’A. au moment où il me dit : « ça se voit ». Et si je n’avais pas décroché à ce moment-là, je lui aurais volontiers demandé de préciser ce « quelque chose » et ce « ça » auquel il semble si évident de faire référence…
Le mouvement de N. se suspend, pour prendre une autre corde.
L’analogie liquide est une référence essentielle pour les cordes, pour moi.
Je sens les vagues de cordes et chacune peut m’emmener plus loin ou me ramener, comme une vague. L’esprit se calque sur le rythme de l’encordeur et chaque passage d’une nouvelle corde est une sorte de crête de vague qui peut ramener autant qu’emporter. Laissant une fraction de seconde à la conscience pour saisir la réalité.
Ma crête de vague prend la réalité d’une phrase où il dit qu’il voulait seulement essayer mais vu moi, il va en passer quelques autres. Et j’ai envie de protester que ce n’est pas juste ! S’il existe Une personne qui me connait dans les cordes c’est forcément N. Sans parler de l’habitude de se côtoyer dans ce genre de jeux, c’est le seul qui reçoit systématiquement mes mots, après. Sans relire mes reports, j’ai forcément déjà parlé de mes « points d’Achille » des cordes. Il sait évidement que passer une corde sur mes bras, sous mon pied ou entre mes doigts, induit une vague à laquelle je ne souhaite pas avoir à résister.
Le jeu s’arrête comme il a commencé sans que je n’y comprenne vraiment rien.
Un peu avant le début de la soirée, Nico propose de m’attacher. Il prend mes mains par le devant. Il passe sa corde sur mes poignets joints devant lui, je regarde le lien, je lui souris, il y a cette connivence évidente entre nous dès qu’il y a une corde. Sa CNV à lui.
Là aussi, il y a quelque chose de la « première fois », le sens symbolique/ mon sens symbolique des choses n’est plus brouillé. Et c’est sûrement ce que j’essaye de lui faire passer dans ce regard, je sais pas. Mais c’est sûrement Le moment le plus important de cette soirée. Une fraction de seconde où « il se passe quelque chose ». Zut, voilà que je parle cryptique moi aussi…
Rationnellement, je n’arrive pas à penser que cela puisse vraiment dépasser le cadre des protagonistes. Admettons que le phénomène ne soit pas seulement issu de l’imagination de l’un mais que les deux partagent vraiment quelque chose, comment cela pourrait être visible aux yeux des autres quand il s’agit seulement de ressenti…
Pourtant je le verrais bien moi aussi ce « quelque chose » entre deux personnes plus tard dans la soirée… Et d’un coup l’évidence me frappe le front… Moi des « quelque chose » j’en vois rarement, presque jamais, sauf hier entre G. et R… Ce qu’il y aurait entre N. et moi serait de cet ordre ?...
Idée contrariante, trop loin de ma réalité.
N. continue son jeu de cordes, il refait ce truc un peu dingue qu’il m’avait déjà fait.
En passant trois cordes successives puis en retirant la première sans toucher aux deux autres. Et ramènes mes bras en arrière. J’adore quand il fait ça, ça a quelque chose de vraiment magique.
Comment quelque chose qui semble si solidaire pourrait bien se détacher si facilement. Et je me dis que c’est pour cela que je n’arrive pas à avoir vraiment envie d’apprendre les cordes, ça casserait ma « magie ».
Puis il m’entraîne au sol et continue de me bercer dans des vagues successives. Une vague me ramène et j’accroche une phrase de G. :
« c’est différent d’hier avec… ».
Je ne retiens pas le nom et là encore, le cryptique « c’est différent » ? Mais quoi donc…
La voix de N. derrière moi « chaque jour est un nouveau jour ». Et les cordes qui se serrent.
Je me souviens vaguement avoir dit que j’aimais que les cordes serrent mais peut-être pas à lui.
Les cordes m’enserrent, même pas besoin de bander les muscles pour les sentir, la spirale m’emporte. Alors que je sens un subtil inconfort sur la clavicule gauche où je suis en appui sur la corde.
Quelqu’un – N. ? – a mis quelque chose sous ma tête, c’est une attention qui m’étonne toujours dans les cordes. Le travail au sol, c’est plus avec A.S. que j’ai l’habitude et A.S. ne prend pas ce genre de précaution. L’inconfort reste en sourdine et j’ai trop l’habitude de gérer une douleur constante pour y prêter une véritable attention. D’autant que N. mobilise mes sens ailleurs, sensation play.
Ma spirale se matérialise dans une onde de frisson qui part de sa main sur ma nuque – encore un de mes talons d’Achille…
A partir de là, les vagues ne me ramèneront plus, N. continue de m’emmener plus loin mélangeant les vagues de cordes avec celles des frissons.
Je me souviens d’une pose qui me rappelle une photo que j’ai aimé sur FetLife que l’esprit note en spectateur de lui-même avec une sensation très typique de l’hypnose : EMC, mon amour.
Tout le reste n’a pas de vraie réalité, douceur, paix, calme, chaleur.
Je ne m’appartiens plus vraiment, j’appartiens à une sorte de tout, mu par une volonté qui n’est pas la mienne. L’univers n’est que sensation, le temps n’a plus de sens. Il faudra vraiment que je prenne le temps de détailler le subspace des cordes/de la contrainte.
Il n’y a pas cette lutte contre soi/ sur soi comme dans les jeux de percussions, il n’y a pas de vagues d’endorphines à monter, juste un doux bercement.
Quelque chose de vraiment hypnotique chez moi, à se demander si cela ne vaudrait pas la peine de tenter d’implanter des suggestions post-hypnotiques à ce moment-là. Erf, il n’y a que moi pour toujours penser à mélanger les EMC…

Et l’inconfort devenu douleur, pulse. Il focalise mon esprit dessus et prend sa pleine existence. Il faut revenir, c’est dur, désagréable. Comme quand il faut lutter sur l’acid pour retrouver la lucidité, un véritable effort de volonté.
J’ouvre les yeux, je ne distingue pas grand-chose, mais j’ouvre jamais les yeux alors j’espère que cela pourra suffire à attirer l’attention.
L’effort m’assomme et les yeux se referment d’eux-mêmes.
Pulsation de douleur, je hais mes clavicules trop saillantes où la corde mord.
Nouvel effort de volonté, mobilisation générale de la conscience encore active, ouvrir les yeux et appeler N.
Je ne parle jamais, je sens bien que cela le déroute.
J’explique pour ma clavicule.
Les cordes dansent à une vitesse stupéfiante, mes vagues refluent à une vitesse vertigineuse, le monde reprend réalité trop vite. N. me dit quelque chose que je ne comprends pas, il le voit et me traduit des excuses. Je trouve ça idiot, pourquoi il s’excuse ? Moi aussi, c’est ma faute. Et puis faute de quoi ?
La faute c’est un truc volontaire et aucun de nous n’a eu vraiment envie que ça arrive.
La percussion avec la réalité me donne toujours une sorte de dizaine de minutes où une sorte d’automatisme prend le contrôle.
J’agis, j’arrive à bouger normalement mais je suis toujours en mode « spectateur de moi-même ». Si je ne profite pas de ce sursaut pour bouger - surtout en soirée -, après c’est mort. Je pars en tremblements et l’émotion prend le pas. Biochimiquement, je me demande si la fin des cordes ne correspond pas à une décharge d’adrénaline, un truc animal du cerveau reptilien pour avoir l’impulsion de fuir après avoir été captif. Et je sais que si je n’utilise pas de suite cette sorte d’élan, après je pars en trop plein, tremblements, idées brouillées, gestes incohérents.
Du coup, je ne sais même pas si je remercie N. correctement. De toute façon, tout est si loin.

Après, il y a les shows à enchaîner.
Et M. qui finalement se matérialise lors d’une des absences de Fab. Charmeur charmant, déroutant avec son côté apparition/disparition, un côté diablotin sorti d’une boîte aux allusions équestres sans ambiguïté.

A un nième moment où je sors mourir de froid dehors pour fumer. En rentrant, il y a A.S. et U. qui font des cordes dans le dos d’I. Je passe en souriant et A.S. m’attrape par les bras en arrière. C’est idiot, j’ai encore mon blouson et je lui dis. Il continue de placer ses cordes en récupérant celle qui était sur U. Et ouvre mes couches successives de vêtements en solidarisant le tout avec les cordes. Un jour, ce type arriva derrière moi et me mettra un sac sur la tête, c’est une évidence à ce moment-là. Il a fait une sorte de poignée avec mes bras et il me téléguide dans la salle. Les idées sont désordonnées ou inexistantes. Gel mental.
Il me jette presque par terre, pas de coussin pour ma tête cette fois… A.S., quoi. Les cordes, la chaleur de la salle qui monte le joint que je viens de fumer… Les gestes d’A.S. continuent de me bousculer, à un moment une vague me ramène, je sens ses mains dans mes cheveux qu’il attache en arrière. Je devine une position que je connais : hogtie.
Je m’étonne toujours à reconnaître les passages de cordes.
Ma spirale me berce, les cordes sont d’une présence obsédante, j’aimerais sortir de moi-même pour les toucher comme pour vérifier ce que je ressens. Une main en papillon sur les miennes. Et les cordes tombent sans avoir fini de m’emmener. Je ne comprends pas.
 A.S. m’explique que mes mains étaient froides… Ah, ça…
J’essaye d’expliquer que c’est le LSD mais les idées s’embrouillent et les mots avec.

La soirée s’étire, j’ai froid comme rarement et cela m’épuise.
A noter, la petite sirène qui fait le bel effort d’oser affronter Fab pour venir jouer sur mon émotion. Trop fragile pour moi, les sirènes, même si elles m’émeuvent.

Drôle de soirée.
Pour la première fois, je touche du doigt les limites des cordes en lieu public.
Et c’est précisément parce que cette limite n’est pas où je le pensais qu’elle m’étonne.
Ma limite ce n’est pas les autres, j’ai une volonté d’abstraction sur la réalité qui peut les faire disparaître. Non, ma limite est après les cordes, quand on a juste envie de se poser calmement avec l’attacheur et qu’il faut faire de la place aux suivant(e)s.
Une sorte d’arrachement de soi qui empêche de vivre/terminer pleinement l’expérience.